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Catholiques, nous sommes tous victimes du cléricalisme

Publié le par Patrice DUNOIS-CANETTE

Des enfants et des jeunes baptisés, et familiers des propositions catholiques, des femmes, des religieuses  voient leur liberté spirituelle manipulée , leur conscience obscurcie, leur âme violée. Les premiers   sourient à la vie dans notre « maison commune »,  cherchent le beau, le vrai, le bien. Les secondes sans lesquelles l’Église disparaitrait des radars   , l’habitent et en prennent soin. Mais des clercs s’emparent de leurs aspirations, quêtes, attentes, soifs ,  les mobilisent comme autant de « failles » par lesquelles ils pénètrent les esprits, les cœurs, les âmes. Ils  sollicitent alors la soumission, l’obéissance, le  consentement,  la communion et s’approprient les corps , outragent, souillent,  violent  tout en  sollicitant un pardon  qui vise  à laisser entendre une complicité et contraint au silence. Déplacés , mutés ils se savent « couverts » , protégés, excusés , et par là encouragés  à récidiver. Ils savent que l’institution  tolère et couvre son « personnel » , regarde   les crimes commis  comme des accidents malheureux qu'il faut vite oublier, les victimes pressées de le faire en pardonnant à leurs bourreaux.

Les crimes, on le sait, et les évêques le découvrent plus ou moins obligés,  sont les produits d’un système structurellement destructeur. Ces enfants, ces femmes sont  marquées à vie dans leur âme et leur chair  par les agressions subies, cachées, mésestimées dans leurs gravité et conséquences. Sans leur  courage  un océan de souffrances continuerait à être ignoré et l’omerta qui rend possibles les emprises et crimes, la règle.

Mais allons au bout des choses et interrogeons nous  sur ce que produit ordinairement aussi  un univers ecclésial  structurellement étouffant et mortifère , un cléricalisme qui désespérément se maintient et cherche parfois à se relégitimiser à peine avoir été contraint de battre sa coulpe.

Rien d’aussi monstrueux, d’aussi abject.  Mais rien non plus  qui ne soit étranger aux mécanismes , aux causes systémiques qui ont produit  ces crimes.  Rien  qui doive  être ignoré , diminué ou  passé sous le tapis. Tout ce que produit le système clérical , tout y compris ce qui ne relève pas du  crime, tout ce qui est nuisible, nocif, entravant, doit être maintenant , sans crainte , examiné, analysé, interrogé.

Rompre avec le cléricalisme dans lequel  les fidèles  ont été socialisé et qui les habite encore, les  conditionne et les  oblige, est   une nécessité, une obligation absolue. Se libérer des formes et structures, des mécanismes symboliques, des logiques, d’une doctrine qui fait de vous d’éternels mineurs , est la condition nécessaire pour accéder à la dignité de baptisé telle qu’affirmée par les Evangiles.  Elle est  la condition même de la poursuite d’une aventure non gagnée d’avance : celle de la reconstruction de l’ Église.

Sans cette conversion, cette révolution, cet examen de ce que le système fait d’eux ,  les laïcs ne seront pas véritablement et librement en état,  de penser, d’imaginer, de commencer  à jeter les bases d’ une  Église qui  porte haut la promesse de celui en qui ils croient

Qu’est-ce que cela veut dire pour celles et ceux qui font partie de l’Église, qui « sont » l’Église ? 

Ne tournons pas trop notre langue dans la bouche,  si nous estimons que l’Église peut avoir un avenir  à cause même du message qui lui a été confié, mais dont elle n’est pas le propriétaire, il faut que les catholiques  osent  en finir avec  les  comportement déférents, refusent la soumission, dénonçent la dépréciation dont ils sont victimes , eux , les laïcs , c’est-à-dire les non clercs,   sortent des silences auxquels  ils ont été habitué , refusent les conditionnements qui les font, malgré eux, compagnons ou complices du cléricalisme.

Excessif ce discours ? Non. Brutal, car il y a urgence. Demain l’ Église si elle existe encore pourrait être regardée , à cause de ses fonctionnements, de son refus de l’égalité et de parité, de sa stigmatisation des « différents », de sa confiscation de la « vérité », de son allergie au débat , de sa peur des valeurs de la démocratie, comme l’ institution « nuisible » honnie dont on espère, attend ou veut la disparition .

Les catholiques doivent-ils,  par exemple,  continuer à accepter que leurs liturgies,  les gestes et symboles qu’elles mettent en œuvre, confortent une  hiérarchie , un « ordre sacré »  qui  installe une  ségrégation de fait entre les baptisés clercs et laïcs , maintient  un clivage insupportable entre les sexes ?  Leurs messes telles qu’elles sont dites ne portent elles pas une grande responsabilité dans le maintien du cléricalisme,  ne contribuent-elles pas à cette sacralisation  si nocive – et d’abord pour ceux qui en ont endossé l’habit- du ministère presbytéral, des fonctions et services hiérarchiques? Ne distillent-elles pas , dimanche après dimanche,  l’idée que les clercs d’une autre « nature » que les laïcs, seraient , eux, leurs rituels  et prêches,  infaillibles,  pourraient échapper à  toute remise en question? Dans les messes, parce que la réforme liturgique initiée par le Concile Vatican II, s’est arrêtée en chemin, l’Église apprend aux laïcs à « croire » le consacré, l’ordonné, à lui obéi, à le vénérer. Et quand  ceux-ci s’interrogent sur leur condition de perpétuels  enseignés, de toujours spectateurs , de continels subordonnés ou émettent quelques réserves et questions sur une distribution des rôles établie par et pour les clercs , ils se voient opposer  la « tradition » et la « longue durée », la doctrine et le magister, l’obéissance, la communion.

Avec la pandémie et les mesures sanitaires le  cléricalisme s’est mis en scène dans des  messes   disponibles sur Facebook, You Tube… ou accessibles en streaming , célébrées  sans présence réelle du peuple « corps du Christ » qui semblent n’exister que par et pour le culte, que par et pour les clercs.

Symboliquement la liturgie dit en creux  ce que montrent  les modes de nomination, de gouvernance,  d’enseignement :  la sacralisation  de l’autorité, des institutions, des fonctions , des structures et formes. Elle leur apporte, et c’est pour cela qu’elle doit  être questionnée en priorité, une légitimation qui semble transcender le temps et l’espace, se présente comme consubstantielle au mystère .

Liturgie ou quelque thème qu’on aborde dans le débat  sur les réformes de l’Église , on se heurte, à chaque fois , en tout cas,  très vite,  à la question d’un système  profondément nuisible au message que la communauté des croyants veut porter, à un cléricalisme qui fait obstacle au développement d’autres formes de visibilité et de présence chrétienne dans la sociéte, d’autres manières d’ habiter  l’Église.

Se libérer de l’emprise du cléricalisme, refuser d’en être des victimes silencieuses,  c’est se donner  capacité à vivre libre, capacité à reconstruire, rebâtir l’Église. C’est montrer que l’Église dont nous nommons et suivons  le fondateur, a commencée à exister.

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Après le confinement, reviendront-ils ?

Publié le par Patrice DUNOIS-CANETTE

Beaucoup ne reviendront pas...

Il ne faudra pas s’en étonner : beaucoup ne reviendront pas dans les églises qu’il fréquentaient encore . Pour ceux là, ce sera une manière de tourner définitivement le dos à une Église que les scandales à répétition et l’omerta qui les a rendus possible, rende difficilement fréquentable. Pour les autres, une manière de solder leurs contentieux avec une Église rigide, crispée, qui ne les entend guère, juge, leur dit encore et toujours sans les écouter, ce qu’ils doivent penser et comment ils doivent vivre. Pour ceux-ci ce sera l’aboutissement d’une fatigue des messes ternes, ennuyeuses où les mêmes président , célèbrent, prêchent et les autres assistent, versent leur obole , se lèvent et s’agenouillent. Pour ceux là, le choix d’une messe sans communauté, sans présence des frères de chair et de sang, sans présence réelle . Pour d’autres encore ce sera la manifestation du refus d’un repas du Seigneur qu’ils ne vivent pas comme l’expression de la communion entre tous les baptisés, mais le signe manifeste et choquant d’un clivage insupportable entre les sexes. Mais disons le, la plupart ne reviendront pas , parce que leur vie continue , se poursuit sans l’Église, comme s’ils avaient pris conscience , avaient osé s’avouer qu’Elle ne faisait plus sens pour eux.

Beaucoup ne reviendront pas. Les règles de distanciation pourtant bien appliqués le montre : les vides sont déjà là. Mais l’Église, encore et toujours, semble persévérer à chercher les causes des désaffections, des éloignements, ailleurs que chez Elle… matérialisme, relativisme, sécularisme, hédonisme, etc... Attendre des « jours d’après » qui ne viendront jamais , n’est pas courageux, ni très « productif » : l’Église, nous ensemble, doit se remettre profondément en cause, apprend enfin pour le faire à vivre une synodalité libre, ouverte qui fasse confiance au « flair » des fidèles. Le veut-elle seulement ? Ses messes affichent en tout cas sur Facebook, You Tube… ou en streaming le visage d’une Église cléricale paraissant contente de l’être. Son interactivité internet est proposée, non pour entendre les questions des baptisés ébranlés par une Église cléricale responsable de crimes, et pas davantage pour permettre un retour d’expériences de ce qu’ils vivent pendant cette crise sanitaire... mais pour recueillir leurs offrandes. Ceux qui sont restés , ne sont jamais partis ou reviendront avaient imaginé autre chose. Ils attendent, demandent sans doute que l’on cherche avec eux comment ouvrir un avenir à leur Église. Ils demandent que les invitations au changement du Pape François ne servent pas d’alibi à l’attentisme et au peu d’imagination du corps épiscopal, à leur propension à renvoyer à « plus haut », « plus loin » l’examen des questions, à taire les questions qui « fâchent ». 

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